Pendant trois mois, au printemps dernier, l’association ECPM et son partenaire congolais, Culture pour la paix et la justice (CPJ), ont arpenté dix des prisons disséminées aux quatre coins du plus grand pays d’Afrique subsaharienne, la République démocratique du Congo (RDC), afin de mener une enquête de fond sur les conditions de détention des condamnés à mort.
Si le pays demeure l’un des plus riches du monde grâce aux précieuses ressources naturelles offertes par son sol, il regorge paradoxalement d’une pauvreté criante, de guerres meurtrières, et de systèmes judiciaire et pénitentiaire suffocants. Alors que les associations de défense des droits de l’homme estimaient jusqu’à présent que 250 à 300 personnes condamnées à mort étaient incarcérées en RDC, l’enquête menée par nos équipes a révélé qu’elles étaient en réalité plus de 510.
C’est le 10 décembre, à l’occasion de la Journée internationale des droits de l’homme, que l’enquête « Vers une mort en silence. Conditions de détention des condamnés à mort en République Démocratique du Congo » est présentée publiquement à Kinshasa, la capitale congolaise, lors d’une conférence nationale organisée par ECPM et CPJ.
Retrouvez la mission d’enquête en version numérique ci-dessous, suivie d’une infographie revenant sur ses chiffres-clé, d’une interview de Liévin Ngondji, et de ressources complémentaires pour approfondir le sujet.
« Rien ne m’intéresse aujourd’hui, sauf la liberté. »
Lire le témoignage de Jojo, condamné à mort depuis 19 ans,
détenu à la prison centrale de Makala.
En plus de constituer une ressource inédite sur la situation de la peine de mort dans le pays, cette publication, rédigée par Carole Berrih (juriste spécialisée en Droit public international et directrice de Synergies Coopération) et Liévin Ngondji (avocat à la cour d’appel de Kinshasa/Gombe et président de CPJ), permet d’offrir aux décideurs congolais un ensemble d’éléments de réflexion sur le sujet, et en particulier sur les conditions de détention des condamnés, en vue d’établir un véritable dialogue avec les autorités locales et de frayer un chemin vers l’abolition de la peine de mort.
Vous y trouverez :
- Les témoignages de personnes condamnées à mort, de directeurs et gardiens de prison, de familles de personnes condamnées à mort et de plusieurs spécialistes de la justice congolaise, contextualisés à travers les systèmes pénal et pénitentiaire du pays
- Une analyse de l’histoire de la peine de mort dans le pays, de la phase précoloniale à nos jours
- Une étude de la justice pénale congolaise et de ses failles
- Une plongée détaillée dans les conditions de détention dans les couloirs de la mort congolais
- Une présentation du dynamisme du mouvement abolitionniste congolais
- Plus de cinquante recommandations basées sur les entretiens et le recherches réalisés, adressées à l’État congolais, aux organisations humanitaires et de la société civile, et aux acteurs de la coopération régionale et internationale.
Cette mission d’enquête a été réalisée grâce à la coopération entre l’association congolaise Culture pour la paix et la justice (CPJ), soutenue par les membres de la Coalition contre la peine de mort en RDC (CCPM-RDC), le Réseau des magistrats congolais contre la peine de mort, le Réseau des avocats congolais contre la peine de mort et ECPM (Ensemble contre la peine de mort).
Elle a été dirigée par Maître Liévin Ngondji, président de la CPJ, coordonnée par George Kishabongo, membre du réseau des magistrats, et menée par des membres du réseau des avocats. Carole Berrih, directrice de Synergies Coopération, en est la rédactrice et reprend avec justesse les témoignages recueillis par les enquêteurs en les contextualisant dans le système pénal et le système pénitentiaire du pays.
Ce rapport s’inscrit dans le cadre de la collection « Missions d’enquête judiciaire dans les couloirs de la mort » qui a pour objectif de faire un état des lieux des conditions de vie des condamnés à mort attendant l’exécution de leur sentence, dans différents pays du monde. L’objectif est à la fois de rendre compte de la réalité des couloirs de la mort dans ces pays et d’interpeller l’opinion publique.
Rappel : La situation de la peine de mort en RDC
Nombre actuel de condamnés à mort: au moins 510 femmes et hommes, civils et militaires, congolais et étrangers, incarcérés dans des conditions déplorables.
Date de la dernière exécution: 2003. La RDC est considérée comme abolitionniste de fait, c’est-à-dire que la peine de mort est en vigueur mais aucune exécution n’a eu lieu depuis plus de dix ans.
Méthodes d’exécution: fusillade, pendaison
Depuis 2005, ECPM s’engage en RDC en partenariat avec la Coalition congolaise contre la peine de mort et l’association Culture pour la paix et la justice (CPJ).
Depuis 2017, ECPM coordonne le projet Accompagner les parlementaires, les institutions nationales et les organisations de la société civile en partenariat avec CPJ. Ce projet, co-financé par l’Union européenne et la Norvège, met notamment en avant le travail des différents réseaux abolitionnistes existant en RDC, tels que les que le réseaux des parlementaires, des avocats ou encore des magistrats contre la peine de mort.
Conférence nationale du 10 décembre à Kinshasa
INTERVIEW : « L’Afrique sera le prochain continent abolitionniste »
ECPM s’entretient avec Liévin Ngondji, avocat en République Démocratique du Congo, Président de l’association Culture pour la Paix et la Justice
Ressources :
Rapport rédigé par :