Après un parcours dans l’évènementiel corporatif, Ramla Liatouji a mis son expertise au service de causes engagées et, notamment, de l’abolition universelle de la peine de mort. Un premier congrès à Oslo en tant que responsable de la production logistique l’encourage à se lancer dans la coordination du Congrès Africain contre la peine de mort à Abidjan en 2018, puis du 7e Congrès mondial à Bruxelles en 2019. Elle revient aujourd’hui sur son expérience et ses ambitions pour cette 8e édition, érigée pour « poursuivre le combat de l’abolition dans un monde ponctuellement décontenancé par une pandémie qui fragilise davantage la question des droits fondamentaux tels que la peine de mort ». En savoir + sur les Congrès mondiaux d’ECPM Ramla Liatouji, vous étiez la responsable de la production logistique lors du 6e Congrès mondial à Oslo, et la coordinatrice du 7e Congrès mondial contre la peine de mort de Bruxelles ; comment les choses ont elles évolué d’un congrès à l’autre ?
Ma première collaboration avec ECPM a été une révélation puisque j’ai compris qu’il y avait beaucoup à faire concernant la cohésion des différents publics, et ce, à une échelle internationale. C’est comme ça que l’aventure avec ECPM a commencé en 2016 avec le congrès d’Oslo !
Je me sentais un peu à l’étroit dans la gestion opérationnelle et j’avais très envie de m’engager dans la coordination des programmes. En 2018, je suis donc revenue chez ECPM pour coordonner le congrès régional d’Abidjan, où j’ai eu beaucoup de plaisir à travailler avec les équipes d’ECPM et tous ses partenaires. Ce qui était intéressant pour moi, c’était de voir les retombées concrètes en termes de plaidoyer menant à une abolition, or, le Congrès d’Abidjan a permis une progression décisive en Afrique de l’Ouest, notamment par l’abolition de la peine de mort au Tchad.
Le 7e Congrès mondial de Bruxelles qui a suivi en 2019 a permis à ECPM d’asseoir sa légitimité à une échelle mondiale, grâce à la coopération active des Etats, des organisations intergouvernementales et des ONG orchestrée par ECPM. La fréquentation a été importante et la mobilisation politique très aboutie. Mesurer cette dimension de progression a été pour moi une vraie source de satisfaction, et a conforté la décision de poursuivre mon engagement abolitionniste.
Cela était sans compter sur les difficultés auxquelles nous devrons faire face dans un contexte de crise sanitaire, en vue de l’organisation du prochain Congrès mondial accueilli par l’Allemagne. Cette situation nous demande évidemment beaucoup plus de vigilance et d’efforts pour rassembler et redynamiser la communauté abolitionniste. Nos partenaires des pays du Sud ayant subi un net ralentissement dans la poursuite de leurs actions dans ce nouveau contexte délétère pour les échanges internationaux. Selon moi, l’enjeu à Berlin sera de conforter la cohésion internationale de la communauté abolitionniste et de faire de Berlin 2022 le 1er évènement post-Covid d’envergure. Ce travail réunit les équipes permanentes d’ECPM et les équipes congrès, qui rejoignent l’association pour pouvoir co-construire avec nos partenaires cet évènement devenu incontournable pour tous.tes les militant.e.s impliqué.e.s dans notre cause. Il est indispensable de relancer cet élan pour poursuivre le combat de l’abolition dans un monde ponctuellement décontenancé par une pandémie qui fragilise davantage la question des droits fondamentaux tels que la peine de mort.
En juillet justement vous avez fait une première mission à Berlin, ville qui accueillera le prochain Congrès, où en sommes-nous dans les préparatifs ?Effectivement, nous avons réalisé une mission très productive à Berlin autour de la mi-juillet avec Raphaël Chenuil-Hazan (Directeur exécutif d’ECPM) et Nicolas Perron (Directeur des programmes). Nous avons tous les trois eu un vrai coup de cœur pour un lieu ciblé pour accueillir les 3 jours de conférences et de rencontres, très différent de ce que l’on a pu connaître jusque-là.
C’est un lieu qui nous ressemble et qui rassemble les valeurs et les codes de la société civile, et qui est véritablement représentatif de ce que peut être la ville de Berlin dans la conscience collective. À savoir une ville culturelle, responsable, à la pointe des prérogatives actuelles en termes de respect de l’environnement et des droits, dans une démarche de valorisation de la jeunesse qui est récurrente et qui monte en puissance dans nos thématiques congrès.
Le 8e Congrès mondial contre la peine de mort aura donc lieu du 16 au 18 novembre 2022 au Radial System-V, la cérémonie d’ouverture dans la prestigieuse salle Pierre Boulez, et la cérémonie de clôture à l’hôtel de ville de Berlin. Je vous encourage à venir, parce que ça va être vraiment bien !
Quelles sont vos ambitions pour le 8e Congrès mondial contre la peine de mort à Berlin ?Elles sont multiples : d’abord, raviver la flamme abolitionniste après une période de défiance. J’ai envie de donner à toutes les parties prenantes l’envie de continuer avec encore plus de vigueur et de conviction. Ensuite, il y a la thématique de la jeunesse, qui sera traitée d’une manière originale pour notre organisation : au-delà de la mission d’éducation et de sensibilisation chère à ECPM, j’ai eu envie de proposer une démarche un peu innovante. À un peu plus d’un an du prochain congrès, nous avons donc lancé le « Abolition Now Tour » ! Il s’agit d’une consultation auprès de jeunes adultes afin d’ouvrir un nouveau dialogue, dans une démarche très inclusive. L’objectif est d’aller chercher, dans 6 pays non-abolitionnistes, la parole et les propositions des jeunes qui participeront à des ateliers collaboratifs ayant pour vocation de stimuler l’intelligence collective en vue de décliner un plan d’actions stratégiques tel qu’ils·elles l’auront imaginé, pour faire avancer la cause abolitionniste localement.
Ces 6 pays sont le Maroc, la République Démocratique du Congo, le Kenya, l’Indonésie, le Liban ou la Jordanie, et les États-Unis. Ces jeunes formeront donc des délégations abolitionnistes qui seront invité.e.s au congrès de Berlin à venir restituer leurs travaux, parler de leur vision, échanger les bonnes pratiques, stimuler la communauté senior… En bref, donner un nouveau souffle à la communauté et engager de nouvelles démarches stratégiques en adéquation avec notre temps et nos moyens d’interactions (activation de réseaux sociaux, techniques innovantes de mobilisation, inclusion RSE…). C’est un projet qui a pour vocation d’essaimer dans les régions rétentionnistes.
Ce genre de grand rendez-vous est-il toujours nécessaire ?
Oui je le crois sincèrement. Ce qui m’a beaucoup séduite dès mon premier congrès à Oslo, c’était d’être témoin du travail de cohésion avec les différents corps de la société, que ce soit des responsables politiques, des acteurs économiques – car la question « business et droits humains » est bel et bien au cœur de la thématique du congrès de Berlin – ou la société civile. Nous intégrons aussi toujours la question de l’intersectionnalité et celle des LGBTQIA+, qui font intervenir, par conséquent, des publics de plus en plus variés.
Retour en images sur le 7e Congrès mondial contre la peine de mort, en 2019, à Bruxelles :