Le climat politique aux USA a des conséquences évidentes sur l’évolution de la peine de mort dans le pays. Si les chiffres confirment la tendance à la baisse des dernières années quant au nombre de condamnations à mort et d’exécutions, ceux-ci révèlent qu’en 2023, et pour la première fois depuis 1976, il y a eu plus d’exécutions (23 hommes et 1 femme) que de condamnations à mort (21). Il s’agit de la 9e année consécutive pendant laquelle les USA ont exécuté moins de 30 personnes. La Floride et le Texas sont responsables de 58% des exécutions en 2023. Des 58 mandats d’exécution actifs en 2023, 48% ont abouti, les 52% restant ont bénéficié de sursis. La durée d’incarcération des condamnations est en forte hausse, 54% de ces condamnés sont dans le couloir de la mort depuis plus de 20 ans. Six des vingt-quatre condamnés exécutés en 2023 étaient dans le couloir de la mort depuis plus de trente ans.
Un nombre important de dossiers d’innocence ont été très médiatisés et n’ont pourtant pas obtenu de cassation ou de révisions de procès. En 2023, trois condamnés à mort ont été innocentés et libérés, soit un total de 195 condamnés à mort innocentés depuis 1973. La Cour suprême a rejeté un nombre alarmant de recours de condamnés à mort, alors que plusieurs élus d’état, (députés ou sénateurs) et procureurs soutiennent plusieurs dossiers d’innocence au Texas, en Oklahoma et au Mississippi. Les recours en grâce dans les juridictions d’état sont remises en question faute de commissions indépendantes, elles ne portent pas leur fruit et leur travail ne fait l’objet d’aucune transparence et/ou redevabilité.
L’état de Floride a ré-instauré la peine de mort pour les violeurs d’enfant, contrevenant à une jurisprudence de la Cour suprême datant de 2008. Le même état a, par ailleurs, fait un grand pas en arrière en abolissant l’unanimité des jurés requise pour une sentence de mort, celle-ci ne requiert désormais que 8 voix pour et non 12 voix. Ces deux nouvelles lois vont, sans aucun doute, mener à une augmentation des condamnations à mort à venir en 2024.
Toutefois, 50% des Américains estiment que la peine de mort n’est pas requise et/ou appliquée de façon équitable. Le président Biden n’a pas aboli la peine de mort fédérale comme il l’avait promis lors de sa campagne pour l’élection présidentielle en 2020, son ministre de la justice a instauré un moratoire sur les exécutions fédérales. Cette même juridiction a requis et obtenu une condamnation à mort l’an dernier.
L’état d’Arizona a suspendu les exécutions à l’arrivée de la Gouverneure Hobbs et le Gouverneur Shapiro en Pennsylvanie a confirmé le moratoire prononcé par son prédécesseur.
Trois états ont mis on vote un texte de loi visant à interdire la peine de mort pour les handicapés mentaux, l’Arizona, l’Arkansas et le Texas. Pour ces deux premiers états, la proposition de loi a été rejetée, au Texas, la Chambre des représentants a approuvé cette loi qui, pour le moment, reste bloquée en commission sénatoriale et n’a pas encore été soumise au vote du Sénat.
Douze états ainsi que le Congrès ont présentés des lois pour l’abolition, tentatives vaines en Ohio et en Louisiane, les autres juridictions étudient cette question attentivement sans pour autant avoir obtenu de résultats concrets en ce début d’année 2024. L’état de l’Iowa tente de ré-instaurer la peine de mort, après l’avoir abolie en 1965, pour les meurtres de policiers et l’État du Tennessee pour les violeurs d’enfant. La Virginie Orientale souhaite également ré-instaurer la peine de mort après l’avoir abolie en 1965.
Deux problématiques inquiétantes se profilent pour 2024.
D’une part les méthodes d’exécution qui prennent une tournure consternante avec l’exécution de Kenneth Smith en Alabama utilisant l’asphyxie à l’azote, une méthode que les vétérinaires rejettent pour l’euthanasie des animaux et qui n’avait jamais été utilisée sur des êtres humains avant le 25 janvier 2024, une mise à mort qui a duré plus de vingt-deux minutes. La Cour suprême des États-Unis n’a pas accordé de sursis (à six voix contre trois) pourtant justifiable par l’application du 8e amendement de la constitution qui interdit les traitements cruels, inhumains et dégradants. Depuis les états du Nebraska et de l’Ohio envisagent d’adopter ce mode d’exécution, d’autres états semblent s’y intéresser faute de pouvoir se procurer les drogues nécessaires à l’injection létale.
D’autre part, l’incertitude politique règne quant à l’issue des prochaines élections en novembre 2024, la probabilité que les démocrates perdent la Maison Blanche, laisse présager un retour potentiel de Donald Trump pour les républicains, ce qui entraînerait probablement la reprise des exécutions fédérales.
Il y a aujourd’hui 2 331 condamnés à mort aux États-Unis.