Retenue en Iran, toujours sous la menace du régime, c’est le directeur d’Iran Human Rights (IHR), Mahmood Amiry-Moghaddam qui a reçu son prix, des mains de l’ancienne garde des Sceaux française, Christiane Taubira, lors d’une cérémonie qui se déroulait à l’Hôtel de ville de la capitale allemande.
Dans une lettre transmise cette nuit l’avocate iranienne déclare : « Je demande au monde entier et à ce Congrès d’être les yeux et les oreilles des Iraniens en ces jours difficiles. Des jours où des jeunes gens qui ont utilisé leur droit légal de participer aux manifestations « Femme, Vie, Liberté » sont injustement condamnés à mort. En changeant le comportement du gouvernement à l’égard des manifestants et en empêchant le système judiciaire d’exécuter les manifestants, on contribuera à abolir la peine de mort dans l’Iran de demain. »
« Ce prix du public est la reconnaissance de la communauté abolitionniste et plus largement de toute
la communauté internationale pour le travail et le courage exceptionnel de cette femme engagée pour la défense des droits humains et l’abolition de la peine de mort en Iran », a déclaré Raphaël Chenuil-Hazan, le directeur général d’Ensemble contre la peine de mort (ECPM), organisatrice du Congrès. « Plus que jamais nous devons être solidaire du peuple iranien et c’est ce que ce Prix Robert-Badinter vient souligner », a-t-il conclu.
Mobilisation exceptionnelle
C’est sur cette note que s’achève le 8e Congrès mondial contre la peine de mort avec une participation record, plus de 1500 congressistes, venus de 128 pays, et une mobilisation politique sans précédent. Trois pays africains, le Libéria, la Zambie et le Malawi ont profité de l’occasion pour annoncer leurs intentions d’abolir la peine de mort dans leur pays respectif au cours de la prochaine année. « Il s’agit là d’engagements majeurs », se réjouit Aminata Niakaté, la présidente d’ECPM, et qui confirme bien que l’Afrique pourrait bientôt devenir le prochain continent abolitionniste. « Cela prouve aussi la nécessité de rendez-vous comme ceux-là pour atteindre notre objectif : l’abolition universelle de la peine de capitale », ajoute-t-elle.
Note biographique : Nasrin Sotoudeh
Tout au long de son parcours d’étudiante, Nasrin Sotoudeh a été confrontée à l’opposition du régime
iranien. Elle obtient néanmoins sa licence en 2003 et plaidera par la suite dans des affaires de peine
capitale, parvenant à éviter de nombreuses exécutions, dont celles de plusieurs mineurs. Dans le
même temps, elle s’implique au sein de LEGAM (Campagne pour une abolition étape par étape de la
peine de mort), aux côtés d’activistes de premier plan. En mars 2019, Nasrin est condamnée à trente-huit ans de prison et 148 coups de fouet, selon sept chefs d’accusation, dont la participation à un
rassemblement illégal aux côtés de LEGAM. Cette sentence s’inscrit au sein d’une répression
systématique visant LEGAM et ses militant·es, comme Atena Daemi ou Narges Mohammadi, toujours
emprisonnées à l’heure actuelle. En 2020, Nasrin commence une grève de la faim pour réclamer la
libération des prisonniers politiques iraniens, avec de graves conséquences pour sa santé. Seule une
permission médicale, obtenue en 2021, l’éloigne pour le moment de la détention. Sa persévérance,
ainsi que son refus de compromettre ses valeurs, même lorsque sa liberté, ses droits et sa santé sont
menacés, ont fait de Nasrin un symbole international de la lutte contre la peine de mort.