Dans un contexte persistant de violations des droits humains en Iran, Nicolas Perron, directeur des programmes chez ECPM modérait un atelier sur la peine de mort comme outil de répression politique en Iran. Shole Pakravan – activiste iranienne et mère de Reyhaneh Jabbari, condamnée à mort et exécutée pour le meurtre de son violeur présumé et Taïmoor Aliassi – spécialiste en droit international et des questions liées aux minorités en Iran étaient invité·es à s’exprimer sur cette utilisation de la peine de mort dans le pays qui compte le plus grand nombre d’exécutions par habitant chaque année.
Les condamnations à mort et exécutions intervenues depuis le soulèvement né, le 16 septembre 2022, en réaction à la mort en détention de Jina Mahsa Amini, violemment arrêtée quelques jours plus tôt par la police des mœurs pour non-respect présumé de la loi iranienne sur le port obligatoire du voile, en témoignent de manière terrifiante : l’Iran condamne à mort pour tenter d’étouffer les résistances. Figures centrales de cette révolte de la population Iranienne, de nombreuses femmes sont aujourd’hui condamnées et exécutées pour avoir tenté de résister aux agressions dont elles sont victimes. L’année dernière, 582 personnes au moins ont été exécutées. En septembre 2023, ce nombre s’élève déjà à 521 : le gouvernement cible particulièrement les jeunes, les femmes et les minorités ethniques et religieuses, notamment les Kurdes et les Baloutches. 140 jeunes ont pris part à cet atelier.
Portraits de nos témoins
Taïmoor Aliassi
Taïmoor Aliassi, exilé kurde iranien et aujourd’hui représentant de l’Association pour les droits humains au Kurdistan (Kurdistan Human Rights) a présenté aux élèves une courte séquence retraçant les exactions commises par le régime iranien depuis la mort en détention de Jina Mahsa Amini. Il a aussi expliqué que la perte, par le gouvernement, de sa légitimité remonte aux élections frauduleuses intervenues en 2009. À ce jour, 80 % des iranien·nes vivent en-deçà du seuil de pauvreté, les besoins des jeunesses sont, au-delà d’être ignorés par le gouvernement, réprimés, le gouvernement soutient l’invasion de Vladimir Poutine en Ukraine, des personnes mineures sont exécutées et les exécutions sont pour certaines rendues publiques (en violation du droit international relatif aux droits humains qui interdit ces pratiques)… En Iran, tous les droits humains sont violés et le gouvernement impose son règne par la force et la terreur.
Shole Pakravan
Shole Pakravan a perdu sa fille Reyhaneh en 2017, au terme de sept années de lutte acharnée contre le régime qui l’avait condamnée à mort. Accusée du meurtre d’un haut dirigeant de la garde islamique qui tentait de la violer, Reyhaneh Jabbari a été exécutée lorsque tous les recours ont été épuisés. Aujourd’hui, Shole raconte comme la force de sa fille demeure ancrée en elle et se souvient de sa détermination à ne rien concéder au régime : elle avait notamment refusé d’écrire une lettre d’excuses à la famille de son agresseur qui aurait permis de la sauver. Cette force, Shole la transmet aux jeunesses qu’elle rencontre à travers le monde en les encourageant à rejoindre le combat pour l’abolition de la peine de mort, même avec de toutes petites actions : « les petits ruisseaux font de grandes rivières », insiste-t-elle, « tout comme la violence, la paix se diffuse au-delà des frontières ».