Contexte d’urgence sur l’escalade des exécutions en Iran
Le 16 septembre 2022, une jeune iranienne âgée de 22 ans du nom de Mahsa Amini est décédée dans un hôpital de Téhéran. Trois jours avant, elle avait été arrêtée par la police des mœurs iraniennes pour « port de vêtements inappropriés » et violemment battue selon plusieurs témoins présents lors de l’arrestation. Née dans la province iranienne du Kurdistan, elle était au moment de son arrestation en vacances à Téhéran et s’apprêtait à poursuivre des études universitaires dans la province de l’Azerbaidjan occidental. Dès l’annonce de sa mort, des manifestations hostiles au régime ont lieu et se poursuivent les semaines suivantes, non seulement au Kurdistan iranien, mais aussi à Téhéran et à Machhad puis dans tout le pays. Le 30 septembre, plus de 66 personnes sont tuées à Zahedan par les forces de l’ordre qui tirent à balles réelles pour réprimer une manifestation. Plusieurs enfants ont été touchés. Ce jour est depuis considéré comme le « vendredi sanglant » par les iraniens.
Le 12 novembre 2022, une Tribunal de Téhéran prononce une première peine capitale à l’encontre d’un homme pour avoir pris part aux manifestations.
ECPM a été parmi les premiers à alerter sur le risque d’escalade dans l’utilisation de la peine de mort. 2022 était déjà marquée par une augmentation très importante du nombre d’exécutions. En 2023, au moins 834 condamnés à mort, dont 8 manifestants, ont été exécutés, soit une augmentation de 43% par rapport à 2022. L’année 2024 a connu une effroyable escalade dans l’application de la peine de mort par la République islamique: au moins 975 exécutions ont eu lieu, dont un minimum d’au moins 31 femmes et 2 manifestants. Il s’agit du nombre le plus élevé jamais documenté ces 17 dernières années, depuis qu’Iran Human Rights a initié son travail de recensement des exécutions en 2008.
ECPM mobilisé auprès de la communauté iranienne depuis 2012
ECPM porte une attention particulière à l’Iran, pays qui détient le record du nombre d’exécutions rapportées à sa population. Depuis 2012, l’association travaille en étroite collaboration avec les ONG locales pour faire reconnaitre les discriminations liées au recours à la peine de mort et plaider pour l’amélioration des droits humains. Chaque année, un rapport sur l’état de la peine de mort en Iran est ainsi publié et largement diffusé : il fournit une évaluation et une analyse de l’évolution de la situation dans ce pays où il est particulièrement difficile d’obtenir des informations de la part des autorités. En se plaçant comme un outil d’information et de plaidoyer fiable, il a contribué au fil des années à des développements positifs en Iran : bien que les exécutions se poursuivent inlassablement, la lapidation a par exemple été suspendue en 2011, et la peine de mort abolie pour la plupart des infractions liées à la drogue en 2017.
En soutenant le travail de la société civile (les réseaux et acteurs de la diaspora) et en plaidant au sein des organes régionaux et internationaux, ECPM encourage l’Iran à progresser pas à pas vers un plus grand respect des droits humains et donc, l’abolition : cela passe par exemple par davantage de transparence, le respect des normes internationales minimales sur l’application de la peine de mort, un champ d’application réduit pour cette peine, ou sa prononciation uniquement pour les crimes les plus graves.
Les réformes encourageantes observées ces dernières années créent une dynamique pouvant être exploitée pour changer fondamentalement le recours à la peine de mort en Iran et la structure juridique et procédurale qui la soutient. C’est l’objectif du réseau Impact Iran, dont ECPM et seize autres ONG sont membres : en menant un important plaidoyer pour le renouvellement du mandat du Rapporteur spécial sur l’Iran (rédaction de lettres, co-signature de lettres, réunions spécifiques avec les représentations diplomatiques et les membres du HCDH), ainsi que pour l’inclusion de recommandations sur la peine de mort dans le rapport annuel de ce dernier, le réseau porte la cause abolitionniste dans le pays mais aussi au Parlement européen et au Conseil des droits de l’homme (CDH) des Nations unies.
Néanmoins, la situation de la peine de mort en Iran demeure alarmante avec une importante augmentation des exécutions chaque année depuis 2021, et un nombre croissant de femmes iraniennes exécutées. Autre constat inquiétant révélé dans notre dernier rapport : le nombre d’exécutions liées au trafic de drogue fait un bond spectaculaire avec un total de 503 personnes exécutées pour des motifs liés à la drogue en 2024, par rapport à 471 en 2023, 256 en 2022 et 126 en 2021.