En 2010, ECPM se donne pour objectifs de fédérer les acteurs et actrices abolitionnistes camerounais·es et de soutenir le réseau des avocat·es contre la peine de mort. Des événements sont organisés afin de favoriser l’échange de bonnes pratiques avec la coalition d’Afrique centrale, les avocat·es et les ONG.
La situation des condamné·es à mort
Prisons vétustes où la surpopulation carcérale est endémique, conditions sanitaires déplorables et rations alimentaires minimales, les conditions de détention des personnes condamnées à mort au Cameroun sont relativement similaires à celles des autres détenu·es. Toutefois, leur condamnation à mort est un stigmate qui influe sur le traitement que leur réserve l’administration pénitentiaire et sur leurs relations avec les autres détenu·es. Fréquemment désigné·es comme responsables en cas de mutineries, d’évasions ou de revendications, ils et elles sont injustement envoyé·es au cachot, subissant de nombreuses privations. De plus, bien que l’accès aux soins des personnes condamnées à mort soit identique aux autres détenu·es, les craintes du personnel pénitentiaire les conduisent à leur refuser les soins extérieurs.
Parmi les condamné·es à mort interrogé·es dans le cadre de l’enquête menée par ECPM, Droits et Paix et le Réseau des avocats camerounais contre la peine de mort (RACOPEM) en 2019, la grande majorité a déclaré qu’elle avait été maltraitée pendant la phase d’enquête préliminaire. Selon la Commission de droits de l’Homme du Cameroun (CDHC – anciennement connue sous CNDHL), le recours à la torture dans les lieux de détention camerounais est très répandu. 78 % des condamné·es à mort rencontrés ont affirmé avoir subi des menaces ou avoir été victimes de torture. Interdite de recevoir des visites et faute de moyens pour bénéficier d’un conseil juridique, la plupart des condamné·es à mort a été contrainte de reconnaître sa participation aux crimes pour avoir la vie sauve.
« Je n’ai pas eu le temps nécessaire pour préparer la défense de mon client. J’ai été désigné par le président du tribunal militaire dans le cadre de la commission d’office. Il m’a obligé à plaider l’affaire immédiatement. […] J’ai sollicité un renvoi pour rencontrer mon client et cela m’a été refusé, sous prétexte que la hiérarchie exigeait des résultats et qu’il fallait juger l’affaire rapidement. Je n’ai pas eu le temps d’examiner attentivement le procès-verbal d’enquête et d’échanger avec mon client. »
Avocat rencontré à Maroua, région de l’Extrême-Nord, pour la mission d’enquête « Condamnés à l’oubli » (2019)