Depuis 2011, ECPM soutient les réseaux abolitionnistes locaux comme son partenaire, la CTCPM, afin de proposer une réforme du système pénal tunisien. Les acteurs et actrices clé du combat (ONG, avocats, médecins, journalistes, etc…) sont encouragé·es à se rencontrer lors d’ateliers de sensibilisation et rendez-vous politiques.
Les lycéen·nes et collégien·nes ainsi que le grand public sont également sensibilisé·es à la question grâce à un large programme pédagogique (interventions scolaires, développement d’outils adaptés au contexte politique et culturel), ainsi que l’organisation de séminaires et conférences à travers le pays et des propositions culturelles (expositions d’œuvres contre la peine de mort, festivals de films, représentations théâtrales, etc).
La situation des condamné·es à mort
Au 31 décembre 2022, 136 condamné·es à mort étaient détenu·es dans les prisons tunisiennes dont 3 femmes. L’immense majorité d’entre elles et eux est détenue à la prison de la Mornaguia ; les femmes sont quant à elles dans la prison de la Manouba. En 2021, le taux d’occupation des prisons tunisiennes était de 126,4 %.
Jusqu’en 1996, les condamné·es à la peine capitale ont vécu l’isolement, enfermé·es dans des cachots, le plus souvent enchaîné·es, y compris la nuit. En janvier 2011, dans le sillage des manifestations populaires ayant abouti à la chute du régime dictatorial de Zine el-Abidine Ben Ali, la Révolution a mis fin aux abus les plus choquants dont étaient victimes les condamné·es à mort. Ils et elles ont notamment été à nouveau autorisé·es à bénéficier de la visite de leur famille proche et à recevoir des couffins de nourriture, deux fois par semaine. Durant toute leur incarcération, jusqu’à la commutation de leur peine en 2012, les condamné·es à la peine capitale ont vécu dans la terreur de leur exécution et ont développé des pathologies liées au syndrome du couloir de la mort. Les prisonnier·ères ont souffert de l’isolement puis de la promiscuité, du manque d’hygiène et d’une nourriture jugée « infecte ».
Leurs conditions matérielles de détention se seraient paradoxalement dégradées depuis la Révolution, car les prisons sont frappées par des restrictions budgétaires ou des pénuries. Même si la situation varie énormément d’un établissement à l’autre, en fonction de la centralité ou de l’enclavement de la région où il se situe, le suivi médical et psychologique des condamné·es à mort est globalement défaillant. Ils et elles n’ont pas eu accès aux programmes de formation éducative, professionnelle et technique et n’ont pas eu la possibilité de travailler. Il n’existe aucun dispositif d’accompagnement ou d’aide à la réinsertion dont pourraient bénéficier les condamné·es à mort gracié·es et libéré·es, qui sont donc abandonné·es à à leur sort au moment de leur sortie de prison.