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Iran : Non à la répression des femmes dans la prison d’Evin

Le 6 août, plusieurs prisonnières politiques dont la prix Nobel de la paix, Narges Mohammadi, ont été violemment battues par les forces de sécurité iraniennes. Une répression inédite dans ce lieu que dénonce ECPM et de nombreux acteurs de la défense des droits humains.
Portrait illustré de Narges Mohammadi par Paul Gros
Portrait illustré de Narges Mohammadi – Paul Gros

Nous, militant·e·s des droits humains, engagé·e·s pour l’égalité entre les genres et le respect de l’État de droit, nous alarmons ces derniers jours du récit qui nous parvient depuis le quartier des femmes de la prison d’Evin. Arrêtées et arbitrairement détenues en raison de leurs seuls combats pour la liberté et les droits humains en Iran, de toutes les opinions, croyances et générations, les prisonnières politiques d’Evin seraient aujourd’hui environ soixante-dix. Nous tenons pour établies les violences qu’elles disent avoir subi le 6 août dernier par leurs geôliers et par les forces de sécurité ayant investi en nombre la prison des femmes le même jour. Nous les assurons du soutien de l’ensemble de nos organisations et des citoyens et militants qui s’y investissent chaque jour.

D’après nos informations, dûment vérifiées et corroborées par plusieurs médias indépendants, ce 6 août 2024, plusieurs prisonnières politiques ont été violement attaquées et battues par des gardes et des agents de sécurité tandis qu’elles protestaient contre l’exécution, en secret et à l’aube, de Reza Reza (Gholamreza) Rasaei, manifestant du mouvement « Femme, Vie, Liberté », en l’absence d’information préalable de sa famille et de son avocat et après avoir subi des actes de torture et des aveux forcés.

Cette répression inédite intervenait alors que les femmes s’étaient rassemblées dans la cour de la prison et faisaient pacifiquement usage de leur liberté d’expression, scandant des slogans exigeant l’abolition de la peine de mort et l’arrêt immédiat de toutes les exécutions. Ce rassemblement intervenait, par ailleurs, dans le prolongement d’une série de mobilisations, tantôt initiées, tantôt suivies, par le quartier des femmes pour exiger l’annulation des condamnations à mort de leur camarade de cellule, Pakhshan Azizi, journaliste iranienne d’origine kurde, et de trois autres iraniennes, Sharifeh Mohammadi, militante des droits des travailleurs, Varisheh Moradi, militante pour les droits des femmes et Nasim Gholami Simiari.

En raison de la violence des coups et des blessures infligées, plusieurs d’entre elles ont perdu connaissance, d’autres ont été mises sous attelle après examen sommaire du médecin pénitentiaire à même la prison et sans bénéficier de soins adéquats. Même pour les cas les plus graves, aucun transfert vers un hôpital en ville n’a été autorisé, privant les intéressées d’une prise en charge médicale d’urgence appropriée.

Reprenant conscience, déterminées et résolues, les prisonnières politiques ont aussitôt déclaré leur intention de porter plainte contre leurs bourreaux afin de ne laisser aucune exaction impunie.

En solidarité à l’endroit de celles et ceux qui continuent de se battre pour l’État de droit

Dans un contexte d’accentuation de la répression interne à l’encontre des militants des droits humains et des dissidents politiques, nous nous alarmons de l’accélération, par la république islamique, des exécutions. Celles-ci ont atteint leur paroxysme le 7 août dernier où 29 personnes ont été tuées, dont 26 lors d’une exécution collective à la prison de Ghezel Hesar à Karaj.

À l’abri des regards, et tandis que l’attention médiatique se focalise sur les velléités belliqueuses et l’escalade de tensions au Moyen-Orient, la république islamique d’Iran continue la première des guerres qu’il a engagées depuis des décennies : la guerre contre les femmes et les opposants.

Nous, militant·e·s des droits humains, exprimons notre entière solidarité à l’endroit de toutes les femmes qui continuent, au péril de leurs vies, de se battre pour l’État de droit, la paix et la démocratie en Iran.

Plus que jamais, le quartier des femmes s’affirme comme le bastion de la résistance et des luttes pour la liberté. Les femmes qui sont injustement et illégalement détenu·e·s dans les prisons politiques iraniennes forcent notre admiration autant qu’elles appellent à notre nécessaire mobilisation.

Aussi, en solidarité à l’endroit de toutes les femmes, mais aussi de tous les hommes, qui continuent de se battre pour l’État de droit, la paix et la démocratie en Iran, nous exigeons, au nom de nos organisations :

  • L’arrêt immédiat de la peine de mort, châtiment inhumain et dégradant en Iran, conformément à notre engagement pour l’abolition universelle de la peine de mort et de toutes les exécutions ;

  • La libération de tous les prisonniè·r·es politiques et d’opinion arbitrairement détenus et l’arrêt des poursuites judiciaires en violation des droits de la défense et du droit à un procès équitable ;

  • La mise en œuvre de toutes mesures, et sans délai, par l’Etat iranien de nature à garantir l’intégrité physique et psychique des personnes détenues qui se trouvent sous sa garde partout dans le pays, et notamment au sein du quartier des femmes de la prison d’Evin ;

  • La mise en œuvre d’une enquête pénale internationale indépendante pour que toute la lumière soit faite sur les violences commises à l’encontre des prisonnières politiques de la prison d’Evin dont la plainte doit nécessairement être reçue par les autorités iraniennes.


SIGNATAIRES : Narges Mohammadi Foundation (France) ; Shirin Ebadi, prix Nobel de la paix (Royaume-Uni) ; Pierre Haski, Reporters sans frontières (France) ; Vibe Klarup, Amnesty international Denmark (Danemark) ; Mahmood Amiry-Moghaddam, Iran Human Rights (IHRNGO) (Norvège) ; Chirinne Ardakani, Iran Justice (France) ; Düzen Tekkal et Mariam Claren, Hawar Help (Germany) ; Rose Parris Richter, Impact Iran (Suisse) ; Hadi Ghaemi, Center for Human Rights in Iran (CHRI) (Etats-Unis) ; Pen international (Royaume-Uni) ; Stefan Löfven, The Olof-Palme Memorial Fund, Olof-Palmes Minnesfond (Suède) ; Raphaël Chenuil-Hazan, Ensemble contre la peine de mort (ECPM) (France) ; Hamid Cyrus, Médecins sans frontières (Autriche) ; Karim Lahidji, Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH) (France) ; End Gender Apartheid Campaign (Etats-Unis) ; Maria Søndergaard, Danish Women’s Society (Danemark) ; Christine Stufferin, Alexander Langer Foundation (Italie) ; Elisabeth Nicoli, Alliance des femmes pour la démocratie (AFD) (France) ; Roya Boroumand, Abdorrahman Boroumand Center for Human Rights in Iran (Etats-Unis) ; Rebin Rahmani, Kurdistan Human Rights Network (France) ; Fariba
Ehsan
, Asociación Irani Pro Derechos Humanos (Espagne) ; Rezvan Moghadam, Stop Honor Killings (Etats-Unis) ; Shahin Helali Khyavi, Association for the Human Rights of the Azerbaijani People in Iran (AHRAZ) (Norvège) ; Gabriele Nissim, Gariwo (Italie) ; Darya Djavahery-Farsi, Neda d’Iran (France) ; Negin Khazaee and Rene Kassie, Queers and Feminists for Iran Liberation (France et Canada) ; Karin Deutsch Karlekar, Pen American (Etats-Unis) ; Moein Arjomand, Baloch Activists Campaign (Royaume-Uni) ; Taimoor Aliassi, Kurdistan Human Rights Association-Geneva (KMMK-G) (Suisse) ; Emma Dinparast, Azadi 4 Iran (France) ; Reza Ghazinouri, United for Iran (Etats-Unis) ; Hassan Nayeb Hashem, All Human Rights for All in Iran (Suisse) ; Shima Silavi, Ahwaz Human Rights Organization (Belgique) ; Hirbod Deghani-Azar, Norouz (France) ; Balochistan Human Rights Group (Suède) ; Faramarz Bahar, Comité indépendant contre la répression des citoyens iraniens Paris (France) ; Collectif Alborz FVL (France) ; Collectif Phénix (France) ; PEN Sweden (Suède) ; Jaleh Tabrizi, Association for Human Rights of Azerbaijanis in Iran (Arcdh) (France) ; Aban Families for Justice ; Masoud Raeisi, Rasank ; Zohreh Habibmohammadi, Collectif BA MA (France).