Pouvez-vous vous présenter brièvement et expliquer comment vous définiriez votre identité queer et ce qu’elle signifie pour vous ?
Je suis Asal Abasian, journaliste iranien·ne et féministe queer. J’ai été forcé·e de quitter l’Iran en octobre 2021 à cause de mon activisme. Après 15 mois d’exil en Turquie, j’ai reçu le Prix Initiative Marianne en France et je vis à Paris depuis janvier 2023. J’ai travaillé comme journaliste en Iran pendant plus de 10 ans et j’étais membre de l’équipe éditoriale du journal Shargh. Maintenant, j’essaie de trouver ma voix ici.
Pour moi, identité queer rime avec lutte. Une lutte contre l’oppression des individus en fonction de leur identité. Je dévoile mon identité pour contribuer à la déstigmatiser, c’est ma façon de me battre au sein de la société traditionnelle et conservatrice de l’Iran.
Dans un contexte de grande répression, comment la lutte pour les droits humains est-elle organisée en Iran et au sein de la diaspora iranienne ?
La véritable lutte se passe sur le terrain et dans les rues d’Iran. Nous, dans la diaspora, ne pouvons que nous faire la voix des luttes en Iran. Il n’y a pas de combat possible en dehors de notre pays. Par exemple, vous ne pouvez pas boire votre café dans les rues de Paris et lutter contre le hijab obligatoire en Iran. Cependant, dans la diaspora, vous pouvez refléter la résilience et amplifier la lutte des gens dans le pays. Je crois que le principal champ de bataille se trouve sur le sol iranien, et notre espoir de changement repose sur les courageux·ses qui luttent là-bas, en particulier les femmes et les minorités.
En tant que journaliste, comment les atteintes à la liberté d’expression en Iran affectent-elles votre travail et votre capacité à amplifier les voix des individus marginalisés, notamment celles des personnes LGBTQIA+ et des femmes ?
Malheureusement, la répression sévère et la censure en Iran empêchent de nombreux sujets d’être abordés dans les médias grand public. Par exemple, écrire sur des questions liées à la communauté queer est totalement interdit. Aujourd’hui, nous voyons la lutte contre cette censure principalement à travers les individus sur les réseaux sociaux. Beaucoup de gens expriment courageusement leurs véritables opinions sur Instagram ou Twitter. En se battant dans leur vie quotidienne, ils repoussent les limites de la censure. C’est vraiment admirable.
Aujourd’hui, pourquoi est-il important d’intégrer la question de la peine de mort dans les luttes queer et féministes ?
Ces deux enjeux sont complètement liés. Selon les lois islamiques et les lois de la République islamique, être gay ou lesbienne est passible de la peine de mort. En Iran, nous utilisons le slogan « les vies queer comptent », ce qui peut être difficile à comprendre dans le monde libre.
Quels messages aimeriez-vous transmettre au public en France concernant les droits humains en Iran ?
Peut-être que la chose la plus importante est de ne pas croire à la propagande de la République islamique quand ils promeuvent la liberté d’expression en Iran. Regardez ce pour quoi les gens se battent en Iran et ne vous laissez pas duper par le blanchiment de la situation par le régime.
Que recommandez-vous pour s’impliquer et soutenir au mieux la lutte pour les droits humains en Iran ?
À mon avis, sensibiliser le public et plaider sont les meilleures solutions possibles. La solidarité du peuple français avec les luttes en Iran, surtout pendant le mouvement « Femme, Vie, Liberté », a été incroyablement encourageante.