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La Chine et la peine de mort : un secret bien gardé

À l’occasion de la visite de Xi Jinping en France, ECPM s’est entretenu avec Marie Holzman, sinologue spécialiste de la Chine contemporaine et Présidente de l’association Solidarité Chine, pour passer en revue l’état de la peine de mort dans le pays. Aujourd’hui, si 46 chefs d’accusation sont passibles de la peine capitale, l’empire du milieu continue de cultiver le mystère autour des données relatives à son application. Où en sommes-nous aujourd’hui ?
Crédits : UN Photo/Jean-Marc Ferré

En Chine, le pouvoir central est omniprésent et exerce un contrôle étroit sur tous les aspects de la vie politique, sociale et économique du pays. Sous la direction de Xi Jinping, la centralisation s’est intensifiée, créant un climat de répression où les droits fondamentaux des individus sont régulièrement bafoués.  

La Chine continue de recourir massivement à la peine de mort, avec un nombre de condamnations et d’exécutions le plus élevé au monde. Malgré les multiples appels de la communauté internationale visant à assurer le respect des droits humains, le gouvernement chinois a souvent choisi d’ignorer ces recommandations émises par les autres pays membres de l’ONU ou d’y répondre de manière peu satisfaisante.

Opacité des chiffres concernant la peine de mort en Chine

Malgré les appels des ONG à la transparence, les autorités chinoises ne communiquent aucune donnée, rendant toute estimation des exécutions difficile. En France, lors des rencontres diplomatiques, les défenseurs des droits sont consultés préalablement mais aucun suivi concret des discussions tenues en coulisses ne leur est apporté. En Chine, les données concernant les quelques affaires de peine de mort médiatisées sont soigneusement contrôlées par l’État et utilisées pour manipuler l’opinion publique en instaurant la crainte et en prétendant rendre justice aux victimes de crime. Cette opacité jette un voile sur les pratiques réelles et laisse craindre le pire quant au respect des droits humains et donc donc aux conditions dans lesquelles est appliquée la peine de mort.

Peine de mort avec sursis

Outre la peine de mort dite « à exécution immédiate », la Chine, depuis le début de son régime autoritaire, est le seul pays à pratiquer la peine de mort avec sursis, une mesure qui ajoute une dimension unique à son système judiciaire. Les condamnés à mort ont généralement deux ans pour faire preuve de repentance, ce qui leur permettait éventuellement de voir leur condamnation à la peine de mort commuée en peine de prison à perpétuité.

En 2019, alors qu’il se rendait en Chine avec sa femme pour leur voyage de noces, le journaliste australien Yang Heng Jun a été arrêté à la sortie de l’avion puis condamné à la peine de mort avec sursis en février 2024. Accusé de connivence avec l’étranger, il risque désormais la prison à vie si sa peine venait à être commuée.

Zoom sur Hongkong : adoption de la loi fondamentale, « Article 23 »

Cette culture de la répression s’étend à présent à Hong Kong, où la nouvelle loi fondamentale renforce le contrôle de Pékin sur la ville. Sous le prétexte de la sécurité nationale, les autorités peuvent désormais poursuivre des individus à l’étranger, menaçant ainsi la diaspora hongkongaise et les militants des droits humains qui ont fui le régime oppressif chinois. Cette expansion du pouvoir de nuisance chinois au-delà de ses frontières soulève des préoccupations quant à la protection des droits fondamentaux, même en dehors du territoire chinois.

Ainsi la Chine continue de faire face à des défis majeurs en matière de droits humains, avec une politique d’application de la peine de mort opaque et des pratiques de surveillance qui s’étendent à l’échelle internationale. Dans ce climat de répression, la lutte pour l’abolition de la peine de mort semble plus difficile que jamais, laissant peu d’espoir aux activistes abolitionnistes. Les exécutions sont estimées à plusieurs milliers par an, un chiffre qui pourrait être bien en-deçà de la réalité dans le pays.