Pourriez-vous nous en dire plus sur votre rôle au sein de Crime Si Poa et sur le mandat de l’organisation, en particulier en ce qui concerne les jeunes au Kenya ?
Crime Si Poa® est une organisation non gouvernementale qui cherche à informer, réformer et transformer la vie des jeunes en les mobilisant pour qu’ils s’approprient les questions de sécurité, de justice et les questions socio-économiques dans leurs communautés. Crime Si Poa se concentre sur l’accès à la justice, l’accès à l’information et l’accès aux opportunités pour les jeunes.
Notre approche repose sur les piliers de l’éducation, du plaidoyer et de l’entreprise sociale et se fonde sur la conviction que la sensibilisation et le partage des connaissances en tant que mesures de prévention peuvent avoir un impact immédiat sur les enfants et les jeunes influençables et vulnérables. Nous nous attachons donc principalement à décourager les jeunes à risque et vulnérables de s’engager dans des activités criminelles et à lutter contre les menaces à la paix par un changement de comportement et d’attitude, tout en promouvant les avantages d’une société sans criminalité.
En tant que directrice des programmes et responsable juridique de Crime Si Poa, je supervise la mise en œuvre des programmes de l’organisation et offre un soutien juridique stratégique. Je dirige également une équipe d’autonomisation juridique composée de juristes bénévoles, d’étudiants en droit et de d’assistants juridiques qui enseignent aux communautés la loi, leurs droits et leurs obligations, renforçant ainsi l’État de droit.
Pourquoi pensez-vous qu’il est important que les jeunes se mobilisent pour l’abolition de la peine de mort et interagissent avec des abolitionnistes plus expérimentés ?
Je crois généralement que, dans la vie, les jeunes ont toujours quelque chose à apprendre de la génération plus âgée et plus expérimentée, et vice versa.
En ce qui concerne la peine de mort, jusqu’à ce que nous parvenions à une abolition universelle, le mouvement abolitionniste continuera à se développer. Une jeune génération d’abolitionnistes continuera à apparaître et à rejoindre le mouvement, apportant avec elle beaucoup d’énergie, de zèle et d’idées nouvelles sur la manière de propulser le mouvement. Cependant, en l’absence de conseils, d’orientations et de structures appropriés, les jeunes courent le risque de se décourager trop tôt et d’abandonner ou de continuer à rencontrer les mêmes défis et les mêmes pièges que leurs prédécesseurs, qu’ils auraient pu éviter en apprenant de leurs erreurs et de leurs luttes et en développant de nouvelles stratégies.
Une interaction avec des abolitionnistes plus confirmés permet aux jeunes abolitionnistes d’apprendre de ceux qui les ont précédés et de mieux comprendre le « pourquoi » du mouvement, les succès obtenus jusqu’à présent, et d’échanger des notes et des idées sur la meilleure façon de faire avancer le mouvement. Cette interaction permet donc la croissance, la continuité et la durabilité du mouvement abolitionniste, car les deux générations travaillent ensemble sur une approche plus holistique tirée de leurs différentes expériences pour lutter en faveur de l’abolition universelle.
Qu’avez-vous appris et ressenti lors de la préparation et de la modération de la session plénière du Congrès mondial ?
C’était à la fois passionnant et un grand honneur d’être invitée à animer la session plénière sur la nouvelle génération abolitionniste.
Lors de la préparation de la session, il était intéressant d’apprendre et de voir à quel point le mouvement abolitionniste avait progressé au fil des ans. En tant que jeune abolitionniste, il était exaltant de voir le nombre d’États abolitionnistes augmenter, pour atteindre 110 pays pleinement abolitionnistes au moment du Congrès. Le 111ème pays abolitionniste – la Zambie – s’est engagé lors du Congrès à abolir la peine de mort avant la fin de l’année et a tenu sa promesse le 23 décembre 2022.
J’ai aussi particulièrement apprécié d’interagir avec un grand nombre d’abolitionnistes confirmés et nouveaux et d’apprendre d’eux, tant pendant la phase de préparation que pendant le Congrès mondial lui-même, et de partager notre vision de l’abolition universelle.
En tant que modératrice de la session, j’ai apprécié les conversations stimulantes avec les différents panélistes et l’apprentissage de leurs expériences uniques dans le parcours de l’abolition. Qu’il s’agisse de ceux qui participent au mouvement depuis plus de trente ans ou de ceux qui n’y sont que depuis un peu plus d’un an, il était motivant d’apprendre les raisons de leur engagement et de discuter de leurs stratégies de sensibilisation et de plaidoyer, ainsi que des nouveaux moyens de soutenir le mouvement et de promouvoir l’abolition de la peine capitale, y compris au sein d’autres mouvements de défense des droits humains.
Quelle a été votre impression sur la mobilisation des jeunes pendant le Congrès mondial ? Cela vous a-t-il donné des idées sur la manière d’impliquer davantage de jeunes dans votre travail ?
La mobilisation des jeunes a été fantastique.
Je pense que le projet Abolition Now Tour d’ECPM a bien fonctionné à cet égard, car les jeunes n’étaient pas seulement des participants au Congrès. Ils ont été activement engagés et inclus, et ont reçu une plate-forme qui leur a permis de se connecter et de partager leurs expériences et leurs idées pour l’abolition dans leurs différents pays et régions avec d’autres participants au Congrès.
Depuis le Congrès, alors que nous continuons à lutter pour l’abolition de la peine de mort au Kenya, nous travaillons en étroite collaboration avec la délégation kenyane de l’ANT sur des projets de plaidoyer afin de montrer que les jeunes aussi sont et peuvent être la voix de l’abolition et d’un éventuel changement au Kenya.